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"Des livres et vous", pour penser les mots et s'envoler, libres, vers d'autres temps et d'autres horizons...

Des livres et vous

Les chiens de Détroit - Jérôme Loubry

Une affaire bien menée et riche en rebondissements, des personnages à la psychologie soignée, un géant sorti des brumes d'une ville en perdition... Un thriller psychologique à la hauteur des attentes de tout lecteur averti.

Les chiens de Détroit - Jérôme Loubry

4ème de couverture

Détroit, mars 2013. Cette ville qui a été la gloire de l'Amérique n'est plus qu'une ruine déserte, un cimetière de buildings. Une nuit, la jeune inspectrice Sarah Berkhamp mène le groupe d'intervention qui encercle une maison et donne l'assaut. Mais aucun recours à la violence n'est nécessaire : le suspect attend, assis à l'intérieur. Il a enlevé cinq enfants. Et il est sans doute le Géant de brume, le tueur insaisissable qui a laissé derrière lui sept petits corps, il y a quinze ans. Alors pourquoi supplie-t-il Sarah : "Aidez-moi..."?

L'histoire s'ouvre donc avec l'arrestation du coupable. Et, pourtant, elle ne fait que commencer. A Détroit, personne n'est innocent.

Une intrigue magistralement entrelacée jusqu'à la fin, bouleversante.

Elle regarda le suspect et se souvint des paroles qu'il avait prononcées lors de son arrestation :"Aidez-moi. Vous êtes ma rédemption." Que signifiaient ces mots ? Elle y avait pensé toute la nuit, sans jamais en avoir la moindre idée. Elle revit son visage alors exempt de coups, ses larmes et son regard implorant. Que voulait-il ? Sarah chassa le sentiment dérangeant qui l'habitait depuis ce face-à-face. En laissant son coéquipier s'occuper de ce géant, en se détournant et en ignorant le bruit des coups tandis qu'elle fumait sa cigarette, elle avait eu l'impression qu'il ne s'agissait que d'un enfant lui aussi, un enfant qui demandait de l'aide à son tour. Une aide incompréhensible sur le moment, répugnante, hideuse.

Les chiens de Détroit, Jérôme Loubry, Ed. Calmann-Lévy 2017, p.31

Détroit (Motor City)

Détroit (Motor City)

Voici donc le tout premier roman de Jérôme Loubry, le troisième de cet auteur que je découvre cette année, après Les refuges et De soleil et de sang.

Lorsque Sarah Berkhamp, jeune inspectrice de la police de Détroit, se voit contre son gré chargée d'une affaire de disparition d'enfant, elle est très loin de s'imaginer où elle met les pieds. Avec son coéquipier Stan Mitchell, elle part sur les traces du Géant de brume, une créature de légende kidnappeuse d'enfants qui a donné son nom, quinze ans auparavant, à un criminel qui a laissé derrière lui sept petits cadavres et a valu à Stan, qui à l'époque avait échoué à le retrouver, une mise au placard et une solide réputation de loser dans la police de Détroit.

Il est assez facile de trouver dans ce roman les premiers frémissements d'une excellente plume que l'on devine déjà grandiose. Une lecture facile au langage clair et précis mais qui pour autant n'est dépourvue ni de style, ni de beauté, ni d'une certaine poésie. Et puis déjà, on y trouve des thèmes chers à l'auteur : tout d'abord, une intrigue impliquant des enfants, mais aussi un paysage et un environnement qui deviennent à eux seuls un personnage à part entière du roman : ici, une ville de Détroit proche de la ruine, désertée par des habitants qu'elle ne sait même plus protéger, stérile et brisée qui, comme la ville de Port-au-Prince dans De soleil et de sang, semble dévorer sa propre progéniture. Et déjà, comme dans ses deux derniers romans, apparaît une créature mythologique, le Géant de brume, d'autant plus inquiétante qu'elle s'attaque aux enfants. Jérôme Loubry nous plonge d'ores et déjà dans les méandres de la psychologie et de l'inconscient, dans les refuges que l'âme humaine se crée pour mieux échapper à la réalité, thématique qu'il développera avec plus de brio encore dans le roman du même nom, Les refuges, rendant ainsi dans chacune de ses oeuvres ses lettres de noblesse au terme galvaudé de "thriller psychologique".

Ce sont ces refuges intérieurs que Sarah et Stan, deux flics cabossés par la vie, vont devoir explorer, quitte à remuer la fange du passé, à ressortir les cadavres des placards, pour partir sur les traces de ce géant assassin d'enfants revenus d'entre les limbes. Ils sont là, les ingrédients classiques d'un bon thriller / polar : un flic hanté par une vieille affaire non résolue, une jeune et jolie coéquipière un peu mystérieuse et pas très bien dans ses baskets, une atmosphère aussi pesante que le ciel lourd, presque baudelairien, qui accable la ville. Et pourtant, l'affaire est si bien menée et riche en rebondissements, et la psychologie des personnages tellement soignée, qu'à aucun moment on ne tombe dans la caricature. On passe les chapitres les uns après les autres, de flashback en révélations, poursuivant nous aussi ce Géant tout droit sorti des brumes d'une ville en perdition... Un page-turner comme on dit, puisqu'il faut des termes anglosaxons pour tout maintenant, bref, on ne le lâche pas. Encore un petit bijou à mettre entre les mains de tous les amateurs de bons thrillers.

 

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